Ecrits

Tombeau

Recueil, 1997-2021

Ou comment admettre que la disparition de ceux qu’on aime infiniment est une nécessité fondamentale de l’existence dans le mouvement de l’histoire du vivant. Ainsi, peut-être, saurions-nous maîtriser le désarroi provoqué par une absence inéluctable et définitive.

J’ai la sensation de pousser une seconde fois le cri de la naissance quand, nus et fragiles, nous sommes saisis par l’extérieur froid, inconnu, sec et bruyant qui nous enveloppe. Agression première et terrifiante, ce premier choc semble être oublié, mais notre corps l’a mémorisé pour toujours et la nuit, il hante parfois nos rêves. Puis, le cœur bat moins vite, nous pouvons nous rendormir, la mère est là et nous protège à jamais – hélas non. Que la respiration se calme, le cauchemar va cesser puisque nous sommes vivants. Malgré tout.

Nous, les enfants de Diogène

Roman, 2017

Suite à leur accidentelle rencontre, deux adolescents parisiens des années 60 décident d’échapper au monde pétrifié dans lequel ils sont nés. Richard et Lucie vont devoir se défaire de leur individualisme idéaliste. Ils imaginent des stratégies qui les entraîneront jusqu’à Athènes. Dans le quartier d’Exarchia des hypothèses, des lignes de fuite s’inventent, hors des programmes et des repères désormais irrecevables que proposent le champ politique autoritaire et ses institutions. Au fil du récit qui se déploie sur un demi-siècle pour s’achever demain, Richard, Lucie et ceux qu’ils croisent sur leur chemin forgent un futur qu’ils veulent à la hauteur de leurs aspirations.

L’humanisme, la tirade de l’homme naturellement bon, ce sont des pirouettes chimériques. D’un geste ferme, on écarte de l’établi ce qui dénature notre ouvrage : la moraline et ce qui lui colle aux bretelles. C’est un premier pas vers la folle sagesse. On vire le trash qui nous pourrit la tête, du genre Vous qui entrez ici laissez toute espérance. On barre espérance, on ajoute en-dessous illusion qu’on barre aussi, comme ça on a fait le tour des gabegies. Espérance et illusion, des valises bourrées à craquer de vide. Depuis le temps qu’on se les trimballe de gare en gare ! Dans ces valises, on aura empilé d’autres supercheries fumeuses qui ont fait leur temps, genre le progrès, les lendemains qui chantent, le paradis et sa foule de vierges décaties, et les chaussettes pur nylon. On balance tout ça. Voyager léger, c’est le b a ba de l’explorateur. Au fait, ils ont quoi dans leurs poches, les explorateurs ? De quoi faire un feu, un peu d’herbe, euh… quatre trucs qui leur vont bien, l’essentiel et c’est tout. Nous, c’est pareil. Un bout de papier et un vieux crayon à la mine aiguisée, histoire de noter les bribes d’une nouvelle langue à inventer, au cas où. Dessinons nos vies comme la nature dessine ses paysages.

Fumier

Roman, 2021

Suite à un événement tragique, Lucrèce, un petit gars de l’est parisien, décide de se venger. Commence un périple qui l’amènera jusqu’au sud marocain où se trouve sa famille maternelle. Du printemps 2018 au 1er janvier 2021, il traverse la France, l’Espagne, circule dans le Rif marocain, jusqu’au sud de l’Atlas. Quand le virus se pointe en mars 2020, cela se complique encore – mais le Covid est-il plus ravageur que ce qui nous démonte depuis bien trop longtemps ?

Aujourd’hui, je réalise que mon père avait largué le monde dans lequel il était supposé vivre, qu’il se racontait une histoire pleine de mensonges, que cette mauvaise foi l’a tué. J’essaie d’imaginer comment il s’y est pris pour en finir. Il a accroché la corde à la poutre de la grange. Il a grimpé sur l’escabeau. Juste avant qu’il donne le coup de pied qui allait le suspendre, il a pensé à quoi ? Quels bruits du dehors lui parvenaient ? A-t-il souhaité que quelqu’un surgisse et le sauve in extremis. Ou bien, la tête vide, juste un dernier geste avant de tomber dans le gouffre et ciao. S’est-il débattu, a-til mesuré ce qu’il faisait ? La mort qu’il se donnait était-elle un châtiment ? Il était clair sur cette question, Dieu n’existe pas, c’est un prétexte à écarter toujours. Alors, ce serait un geste exemplaire, pour que d’autres après lui prennent en main le sort des mecs comme lui ? Non, il n’était ni moraliste ni activiste, même pas philosophe, juste un mec bien. Sa mort serait donc la seule qui vaille, celle qui effacerait enfin la terreur quotidienne qui le tuait à petit feu ? Un héros déchu, mon père.

Ondes de choc suivi de Trois chants amoureux

Nouvelles, 2020

Par inadvertance, Alice a traversé le miroir. Perdue dans un étrange sous-sol labyrinthique, elle tente de saisir ce qui l’a conduite jusque-là.
L’humanité serait un virus cosmique ? Soit. Nous voici donc bons pour la casse. Restent la douceur de vivre et sa fureur, la littérature, l’amour et leurs questions turbulentes.
Comment pourrait-on exister dans un seul corps doté d’un seul esprit, sinon en se créant des doubles déguisés, détraqués et contrefaits afin de débusquer les pièges tendus.

Le psy, toujours coincé sur le divan, s’amuse. Il compte ses doigts, dans un sens puis dans l’autre. Apparemment satisfait de sa position, il remarque pour lui-même : « Parfait ! L’art naît de la contrainte, l’homme s’accomplit dans la résistance. Mais n’oublions pas le sexe, ce centre mystérieux du cerveau. » ajoute-t-il, en se déboutonnant.
Monsieur H., épuisé, s’allonge à même le sol et s’endort. Le psy, au sommet de l’extase, a fermé les yeux. Pour ne pas les gêner, Alice lit à voix basse.

Le Livre des Formants

Pictogrammes, 2008

Dans la réception d’un message structuré de façon ouverte, l’attente implique moins une prévision de l’attendu qu’une attente de l’imprévu. Quels peuvent être les enjeux d’une dynamique ouverte dans l’œuvre artistique ? Provoquer une émotion insolite par le biais d’événements mobiles, imprévisibles mais organisés, librement perçus par celui qui en expérimente le parcours. Différence et répétition, rupture et continuité, concurrence et occurrence créent implicitement un cinétisme graphique ou sonore à interpréter. Ce livre invite à parcourir l’un des multiples labyrinthes où se risquent formes et couleurs.

A quel instant du parcours sommes-nous ?
Les lignes de fuite rendent plus indistinct encore
leur point de convergence perceptible là au loin.
Peut-être faudrait-il nous aider avec un jeu de l’Oie, des cartes, un jeu d’échecs ?
Choisissons une vraie roulette russe et devenons cadavre exquis.

Le Livre des Spectres

Imaginaire graphique, 2014

Une invitation au voyage dans les profondeurs du Sous-sol, là où s’exilent d’improbables figures révélées par un trait de graphite. Cela fourmille et s’enfle dans le noir silence.

Traces résiduelles du dessin,
les Spectres en sont les témoins subliminaux.
La proie pour l’ombre.

Panique à Golden Park

Conte, 2013

Alors que Lys et ses trois petites sœurs s’amusent gentiment dans le parc, un lutin fripon les entraîne dans les plus étranges aventures. Sauront-elles échapper aux dangers qui les guettent ?

Il était une fois une époque lointaine où les enfants adoraient jouer ensemble car ils n’étaient pas encore vampirisés par les petites boîtes magiques que de méchants ogres inventèrent. Ces affreux cannibales, qui s’ennuyaient parce qu’ils ne savaient pas plaisanter, s’enfilaient par le trou des yeux pour dévorer la tête des petits enfants et se nourrissaient ainsi des trésors qu’elle contenait.

L'ogre et la petite fille

Conte, 2016

Une petite fille part à l’aventure. La nuit tombe. Ses parents la cherchent.

Où se cache-t-elle ?
L’ogre a faim. Il engraisse la petite fille capturée.
Va-t-il la manger ?

Rencontre du troisième type

Photo-poème, 2015

Comme tant d’autres, un jeune homme va mourir. Comme tant d’autres, le virus du sida l’a rongé. Avant que ne cesse de battre son cœur, il se souvient, rêveur fantasque, des choses connues, des musiques anciennes, et invente un devenir qui n’existera pas.

Partir. M’échapper de l’enfer. Maintenant.
Je m’agrippe fermement au rayon de lune et me lève.
Je progresse vers la fenêtre que j’ouvre, je l’enjambe, je m’envole.

La Méridienne

Chroniques
Tomes I, II, III, IV, V, ...

Traces de vie saisies au fil du temps pour ne pas se perdre en chemin. Sont rassemblés des notes personnelles, des articles et des repères biographiques d’écrivains, de penseurs et d’artistes.

[…] Un pour un et tous pour rien. J’en suis là, à cultiver les habitudes qui me différencient, à trier, identifier, éliminer le superflu – c.a.d. presque tout dans le tas d’ordures, dans le sépulcre pourrissant qu’est le territoire des […]

[…] Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour, écrivait le poète Pierre Reverdy. Un poncif usé jusqu’à l’os. Au secours ! Cachons-nous dans les buissons et batifolons sans entraves !
[…]

[…] et le profond ennui ressenti face au mode de vie bourgeois et middle class. Licence de lettres et master en littérature comparée. Admirateur de Char. Ami de Jack Nicholson qui l’aide financièrement. Borgne à sept ans lors d’une querelle avec une petite voisine, il meurt d’une […]

[…] Valadon. Beau visage dont elle transmet la gravité pensive dans tous ses portraits. Ses nus sont peu convaincants. Plus que tout, j’aime son tempérament libre et passionné que semble, à tort, contredire la quasi froideur des personnages qu’elle peint. Le calme cache […]